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Quand elle est réveillée par le cri venant de l'extérieur passant à travers la charpente sous les tuiles de sa vieille maison kabyle, déchirant les ténèbres de la nuit souvent hivernale, une voix étouffée, mais alarmante, d'une sonorité bien particulière qui ne pouvait s'adresser qu'à elle, appelante : « WA NA-FADHMA... ! » Son unique réponse était : « AQLIYINE (j'arrive) ».

Quelques minutes à peine elle sortira. S'adressant à la silhouette noire l'attendant, sa seule question sera « ANISSA ? (c'est par où) » Elle sait qu'il y a urgence.
Qui étaient les futurs parents ? D'où venait le messager ? Son vieux mari qu'elle laissa seul dans la nuit de surcroit malade ! Qu'importe. Il fallait faire vite.

Telle était Na fadhma el hadj appelé par tous « Jida » la sage-femme de Tifrit n'Ath Oumalek des dizaines d'années durant.
Elle était connue et reconnue dans tout le village de Tifrit, mais même au-delà, Bouaouene, Mehaga, Ait aicha... . On venait la chercher à toutes heures par toutes les saisons. À pied où sur le dos d'un âne qui lui était réservé elle suivait. Elle abandonnait sa maison, son mari, parfois pendant des jours au soin des voisins et de la famille pas toujours solidaire.

 

Née « A. Fatma » dans un village de l'actuel daïra « Adekar » dans la petite Kabylie. Le destin l'amena à Tifrit en épousant El hadj M'hand Said, de la tribu (adrum) Ibaâzizene. Personne ne lui présageait le rôle noble que l'avenir lui réserverait dans ce village. Elle n'était pas sage-femme. Elle le devint.
Avait-elle une maîtrise du domaine obstétricale (grossesse, accouchement) ? Non.
Ses connaissances lui viennent d'un héritage traditionnel ancestral.

Elle se plaisait à raconter l'émerveillement d'un médecin français qu'elle avait assisté dans un accouchement difficile durant la guerre de libération. Elle arrivait à détecter avec ses mains le mal positionnement du bébé, à le tourner et à donner les bonnes consignes à la future maman et aux assistantes avec calme. Le médecin qui était désorienté finit abasourdi.
Son expérience et son intuition ont souvent pu sauver des femmes et leurs bébés dans les situations les plus désespérées. Les villageois n'avaient qu'elle et tout le monde était content de l'avoir.
Mais l'inévitable ne peut être évité. Quand un accouchement se termine mal, un bébé ou une mère qui décède, elle faisait de son mieux. Elle s'investit complètement en accompagnant la famille les aidant moralement et matériellement.

JIDA s'est consacré cœur et âme à faire ce qu'elle sait le mieux, en se déplaçant aux domiciles des futures mamans quelques soient les conditions pour : accouchements, soins, accompagnement, soutient morale et toute aide possible à la mère et au bébé. En contrepartie, les gens lui offraient ce qu'il pouvait, un foulard, une robe, un peu de semoule, de l'huile, des œufs... Quand les dons sont conséquents, elle les offrit à son tour aux nécessiteux. Elle connaissait le mieux la situation des uns et des autres tout en respectant la vie privée de chacun.

Elle avait une petite bassecour, elle cultivait ses jardins en plus de quelques figuiers et quelques vignes, c'était ses seules ressources. Sans enfant, elle vivait avec son mari malade et fragile.
Quand la famille du bébé qu'elle venait de faire accoucher est très démunie, elle revenait chez elle chercher dans ses réserves pour leur offrir les maigres provisions qu'elle aurait pu mettre de côté, ce qui enrageait son vieux mari ajoutant encore plus de tension à leur couple.
Elle nourrissait la maman avec les œufs de ses propres poules et restait à ses soins jusqu'à son plein rétablissement.
Même après l'indépendance et l'apparition des cliniques et de la médecine moderne, les gens faisaient toujours appel à ses services. Elle est la « Jida » de la grande majorité des Tifritiens.

Rattrapée par l'âge, elle n'avait aucune pension ni retraite. Son mari décédé lui laissa une maison et des terres, mais dans une société d'hommes elle n'avait droit à aucun héritage, donc d'aucun secours.
Elle finit ces vieux jours, pauvre et malade accueilli chez sa vieille sœur Fatima également de Tifrit. Elle était seule à ces soins. Alité, les deux dernières années étaient particulièrement pénibles pour les deux femmes.
Elle décéda le mois de juillet 1987 dans l'indifférence, que Dieu ait son âme et lui accorde sa miséricorde et l'accueille dans son vaste paradis.

ILLA YIWEN ILLA ULAC-IT ILLA WAYED ULAC-IT ILLA

 

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